Souvent les configurations merveilleuses produites par l'échec révèlent la médiocrité des objectifs. Bien sûr, nous devons faire tout notre possible pour réussir, sinon, nous ne pourrions pas véritablement échouer.
Si Buster Keaton n'essayait pas vraiment de construire sa maison, il n'y aurait rien de drôle lorsqu'elle s'écroule sur lui.

Cornelius Cardew

Parfois, lorsqu'on accommode les restes, la chose est goûtue. Saupoudrée de subtiles intuitions, la douce alchimie des miracles du hasard discrètement opère. Parfois elle n'opère pas et c'est dégueulasse. Parfois les sommes éparses d'objets laissés pour compte par le progrès, la performance et l'obsolescence programmée gagnent, sur le piédestal du détournement, une nouvelle valeur d'usage à nos yeux. Parfois elles ne la gagnent pas, c'est encombrant et inutile. Il arrive que l'ennuie l'emporte sur l'apathie et, mue par une force que l'on pensait enfuie pour toujours, on s'amuse encore comme des fous avec de vieux jouets déglingués, aventure improvisées dans une sélection du tout-venant. Il arrive aussi souvent que cela n'arrive plus et que l'on s'effondre devant la télévision, seul et las.

Pigeon ! Alouette ! Bécasse ! Canard boiteux ! Perruche ! Cervelle de moineau ! Corbeau ! Dinde ! Vieille chouette ! Faisan ! Grue ! Harpie ! Jeune coq ! Manchot ! Oie blanche ! Perroquet ! Pingouin ! Vieille pie ! Pintade ! Poule de luxe ! Butor ! Poule mouillée ! Rapace ! Tête de linotte ! Vautour ! Vieux hibou ! Vilain merle ! Dindon de la farce ! Triple buse !!!

Ah, si seulement de simples agencements de poids et contre-poids, fétiches de quelques brillances, mobiles louvoyant depuis la parodie, pouvaient réellement nous protéger de tous ces noms d'oiseaux de malheur et nous donner le courage d'abandonner pour toujours la politique de l'autruche — horrible équilibre qui lie les subalternes à leurs manipulateurs.

A.M.